Pensées pour Patrick O’Connel qui nous a quittés.
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Vœu de l’exécutif relatif à ce que la Ville de Paris réunisse les associations engagées sur la question du chemsex pour élaborer en lien avec elles un plan parisien d’informations sur le chemsex et de réduction des risques.
Madame la Maire, Mes chers collègues,
Aujourd’hui, c’est d’un phénomène important et dévastateur mais si peu présent dans les discours politiques et l’action publique que nous avons souhaité vous parler avec ma collègue Anne Souyris et, en conformité avec les engagements de campagne de Anne Hidalgo.
Pourtant, le chemsex est une pratique qui s’est développée ces dix dernières années suite au succès rencontré par les applications de rencontre et l’arrivée de nouveaux produits de synthèse, accessibles à très bas coût sur internet (notamment le GBL). Beaucoup de jeunes et de moins jeunes – et plus seulement dans la communauté gay - ont des relations sexuelles sous l’emprise de drogues pour amplifier les plaisirs bien sûr mais aussi, je le crois, pour se libérer certainement.
Cette pratique est risquée et j’ai éprouvé jusque dans mon intimité, dans ma famille, dans mon couple ses conséquences terribles avec la perte de mon mari Christophe. Depuis sa mort, je me suis juré que je participerai à la mise en place d’une vaste campagne d’information à Paris.
On ne peut jamais se remettre de la perte d’un grand amour, de celui qui illumine toute une vie, moi qui arrive au bout du chemin. Et c’est forcément pire dans de telles circonstances qui vous culpabilisent, qui vous font vous demander quelle erreur vous avez vous-même commises. Et bien sûr, ça vous oblige à tout mettre en œuvre pour que la mort de Christophe ne soit pas une mort pour rien.
Face aux témoignages bouleversants que j’ai reçus après la publication de Plus Vivant que jamais - plus de 400 ! -, face aux cris d’alerte des associations, face aux silences gênés des acteurs publics, nous voulons aujourd’hui signifier que nous n’avons pas renoncé à notre culture d’humanisme. Il n’est pas normal que l’on détourne les yeux, que l’on prête une oreille discrète à ce que nous racontent les personnes qui utilisent ces produits, à ce que nous racontent leurs proches ainsi que les personnes qui les accompagnent.
Les mesures sanitaires depuis bientôt un an n’ont fait qu’augmenter l’urgence de la situation. Les difficultés croissantes rencontrées par une partie des personnes, du fait des mesures restrictives et des fermetures des lieux habituels de sociabilité ont renforcé le sentiment d’isolement et le sentiment d’exclusion du fait de manque de possibilité d’échange entre pairs. Les pratiques ont évolué. Si certaines personnes ont pu arrêter avec le confinement, d’autres, au contraire, ont perdu le contrôle de leurs consommations et de nouveaux utilisateurs sont apparus.
C’est pourquoi, mes chers collègues, il nous est apparu indispensable, avec Anne Souyris, tout d’abord de réunir très rapidement l’ensemble des associations engagées sur la question du chemsex. Il nous faut pouvoir mieux appréhender le phénomène et proposer des modes d’action ayant fait leurs preuves.
L’objectif étant, mes chers collègues, que la Ville de Paris élabore un plan parisien d’information et de réduction des risques sur le chemsex avant la fin de l’année 2021. Ce plan associera les différents acteurs impliquées ou concernées : associatifs bien sûr mais aussi professionnels de santé et représentants de l’État.
Le chemsex est un phénomène auquel de nombreux professionnels sont confrontés et qui demande une prise en charge transdisciplinaire pour répondre, le plus vite possible, aux besoins de nombreuses personnes qui le pratiquent.
Face à cette épidémie silencieuse, face à l’isolement des personnes et de leurs proches, il est important d’être à la hauteur de notre idéal de fraternité et de dignité, en somme, d’humanité. C’est pourquoi j’invite l’ensemble d’entre vous à soutenir ce vœu et cette initiative pour répondre aux réalités du terrain et trouver des solutions face à un phénomène complexe qui nécessite une réponse forte des puissances publiques.
C’est autant le vœu d’un mari inconsolable que celui d’un élu qui doit agir.
Agir avant qu’il ne soit trop tard ! Vraiment…
Je vous remercie.
Dans quelques jours sortira la version française du livre « Positive » de Camryn Garrett (éditions Robert Laffont), un roman centré sur la vie avec le VIH que Jean-Luc Romero-Michel, président d’Elus Locaux Contre le Sida a accepté de préfacer. L’occasion de revenir avec lui sur cet ouvrage, mais aussi plus largement sur la vie avec le VIH et les enjeux actuels de la lutte contre le VIH/sida.
Tout simplement parce que c’est un très bon livre ! Et puis, en tant que militant de la lutte contre le sida et personne vivant avec le VIH, ce livre ne pouvait que me toucher.
Je crois fondamental que l’on parle du VIH mais que l’on en parle bien, c’est-à-dire en prenant en compte les progrès et les réalités scientifiques et non les fausses représentations. Ce livre, en cela, est un excellent outil d’information. Et on en a besoin ! Je vous rappelle que selon l’enquête de Sidaction en 2020, plus d’un quart des jeunes interrogés estiment être mal informés sur le VIH/sida, soit une augmentation très inquiétante de 15 points par rapport à 2009. Cela prouve bien l’effort à faire en matière d’information !
Mais, ce serait trop facile de ne cibler que les jeunes comme si, dès que l’on dépasse un certain âge, on deviendrait subitement bien informé. La magie des certitudes… La réalité est bien différente et une récente étude mettait en exergue le fait que plus d’un parent sur cinq se sentiraient « mal à l’aise » si l’un des enseignants de leur enfant était séropositif… cela prouve bien que cet immense effort d’information est à faire… à tous les âges !
Je vais reprendre quelques-uns des mots que j’ai écrit pour la préface du livre : « vivre avec le VIH, c’est d’abord vivre. Vivre, c’est aimer, espérer, ressentir des émotions, construire ». Vivre avec une maladie ne résume pas la personne à sa seule maladie. Etre séropositif, ce n’est pas qu’être séropositif, c’est être un amoureux, un ami, un travailleur, un citoyen, un être qui vit tout simplement. Et je crois que c’est très bien expliqué dans le livre de Camryn Garrett.
Vivre avec le VIH en France c’est aussi savoir que l’on ne transmet pas le VIH. Et c’est absolument fondamental. Je rappelle la réalité scientifique : une personne séropositive sous traitement et dont la charge virale est indétectable ne transmet pas le virus responsable du sida. En effet, les médicaments antirétroviraux rendent le virus indétectable dans le sang et les liquides sexuels des personnes vivant avec le VIH. Le virus devient de fait intransmissible. Cette réalité, elle est encore mal connue, à nous de diffuser très largement l’information.
Vivre avec le VIH en France, c’est aussi vivre dans une société où le niveau de discriminations est toujours très fort à l’encontre des personnes vivant avec le VIH. Et on le sait bien : la sérophobie a un impact très négatif sur le niveau de prévention et la promotion du dépistage. La fin du sida en 2030, objectif affiché des plans de santé publique, ne passera que par une politique ambitieuse de lutte contre les discriminations !
Oui. Mais ce « oui » n’est pas un « oui » très optimiste. En tout cas, c’est un « oui » exigeant et ce d’autant que la crise Covid a eu et a un impact très fort sur la lutte contre le VIH/sida ; les mises sous PrEP et le nombre de dépistage ont chuté alors que l’on sait que ce sont les outils les plus efficaces pour arriver à la fin du sida.
Alors oui, la science nous a prouvé qu’arriver au « 0 contamination d’ici 2030 » avec cet objectif du « 3x95 », c’est possible… uniquement si l’on y met réellement les moyens, aussi bien politique que financier !
Financièrement, il est nécessaire que les pouvoirs publics prennent en compte le fait que certains grands financeurs de la lutte contre le sida ont été très impactés par la crise Covid. Je pense notamment à Sidaction et à Solidarité Sida qui ont vu leurs opérations phares, soit annulées ou profondément remaniées. Les associations devront être soutenues à hauteur, comme le sont les acteurs du secteur privé. Politiquement, il faut que le sujet du VIH/sida soit investi. Quand je vois que le décret permettant aux médecins généralistes d’initier la PrEP a été retoqué, je me dis qu’il y a là un réel manque de vigilance alors que le décret est attendu depuis bien longtemps…
Permettez-moi de dire un mot de la situation au niveau mondial car la fin du sida ne peut pas être envisagé au niveau national sans effort mondial à la hauteur du défi. 38 millions de personnes vivent avec le VIH dans le monde. Et alors que cela fait bientôt 40 ans que l’on a découvert le virus du sida, que cela fait des années que des traitements existent pour permettre aux personnes séropositives de vivre avec le virus, il y a encore 12 millions de personnes qui n’ont pas accès à ces traitements. Et 700.000 décès par an. Ce combat pour l’accès aux traitements est fondamental et la prochaine conférence de reconstitution des ressources du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme sera une étape primordiale !
Je vais vous dire : ce que m’ont appris ces 30 ans de militantisme, c’est que les progrès dans la lutte contre le VIH/sida sont fragiles. A nous d’être particulièrement exigeants et vigilants.