Mon discours à la réunion ADMD d'Antibes
Chers amis,
Quelle belle réunion nous avons eue aujourd’hui…
Merci à celles et ceux d’entre vous qui ont fait le déplacement jusqu’à Antibes, parfois en prenant la route aux aurores. Merci à nos délégués qui, une fois encore, ont montré leur mobilisation au service d’une cause, d’une liberté, d’un idéal. Merci à toutes celles et tous ceux, bénévoles et salariés, qui ont fait de cette journée une grande réussite. Merci à notre délégué pour les Alpes-Maritimes et Monaco, notre ami Jacques Desaunay, d’avoir piloté de main de maître cette organisation et je remercie aussi son épouse toujours à la manœuvre à ses côtés.
Merci également à Marie-Christine Barrault, Julien Cendres, Pauline Delpech, Irène Frain, Brigitte Lahaie, Véronique Massonneau et Gilles Vervisch de s’être engagés ainsi publiquement à nos côtés, d’avoir accordé un peu d’un temps que je sais compté pour eux pour rappeler que ce droit que nous demandons depuis 36 ans ne retirera rien à celles et à ceux qui n’en veulent pas mais soulagera et rassurera celles et ceux qui en veulent. Merci d’avoir rappelé qu’un droit ne sera jamais une obligation…
Merci enfin à Noëlle, notre amie Noëlle Châtelet, qui assure la mobilisation, au-delà de notre seul comité d’honneur, de ces personnalités dont la présence honore régulièrement et de plus en plus nos actions.
Certains m’ont interrogé depuis plusieurs semaines sur le choix d’Antibes pour réunir cette assemblée générale, quelques mois après la promulgation de la loi du 2 février 2016 prétendant créer de nouveaux droits en faveur des personnes malades et des personnes en fin de vie, dont le principal artisan n’est autre que le maire de cette belle ville. Aucune provocation – un peu de malice, tout de même – ni aucune agressivité. Mais le rappel éminemment symbolique, sur les terres de Jean Leonetti - monsieur fin de vie des gouvernements de droite et de gauche -, que cette loi - la 3ème loi sur la fin de vie en dix ans - n’est en fait qu’un bricolage de textes déjà en vigueur (loi de 2002, loi de 2005, décret de 2006, loi de 2008, décret de 2010) et qu’elle ne permettra toujours pas aux Françaises et aux Français de trouver la sérénité, leur dignité, la maîtrise de leur vie, la force d’assumer… lorsque la vie – puisque nul d’entre nous, nul d’entre les législateurs, n’est immortel – n’est plus qu’une survie plus ou moins difficile, tant physiquement que moralement.
D’ailleurs – une fois n’est pas coutume – je dois remercier les services municipaux, l’office du tourisme et le Palais des Congrès pour leur professionnalisme, leur accueil et les possibilités qu’ils nous ont offertes, même si j’ai bien compris que des dents ont grincé…
Septembre 2016/juin 2017 : c’est une période de dix mois de mobilisation qui s’ouvre officiellement aujourd’hui. Dix mois durant lesquels il faudra agir sur le terrain, faire preuve de compétence et d’unité, de détermination et de force, pour rappeler à celle ou à celui qui sera élu à la présidence de notre République, à celles et ceux qui seront élus à l’Assemblée nationale, que la France se dirige dans le strict cadre de notre société laïque, que les oukases de certains religieux ne peuvent primer sur les lois de la République, que chaque nouvelle liberté accordée, dès lors qu’elle respecte notre Constitution, n’enlève rien à la communauté nationale, et que sa vie n’appartient qu’au seul citoyen, majeur et capable. Mon corps m’appartient ! Ma mort m’appartient !
Cette année encore, c’est donc un nouvel appel au travail de chacun que je lance. Voici notre feuille de route :
- Le 2 novembre 2016, lors de la traditionnelle Journée mondiale pour le droit de mourir dans la dignité, il devra y avoir des animations dans chaque département. Même dans les délégations encore orphelines, même dans celles dans lesquelles le délégué – et il en a parfaitement le droit – sera absent à ce moment-là. Chaque adhérent, avec l’aval du secrétariat général, sans que cela lui coûte un seul centime, mais du temps, oui !, pourra organiser un geste symbolique pour rappeler le souvenir de ceux de nos proches qui sont morts dans des conditions qu’ils n’avaient pas souhaitées et réaffirmer notre droit à notre ultime liberté. Cette ultime liberté qui fut notre slogan dès 2008, lors du 17ème Congrès mondial des ADMD organisé à Paris.
- Le 18 mars 2017, une grande manifestation puis une grande réunion publique au Cirque d’Hiver Bouglione se tiendront à Paris, comme en 2012. Cette année encore, les candidats à l’élection présidentielle ou leur représentant seront invités à donner leur point de vue sur cette revendication portée par plus de 90% de la population française. Libre à eux ensuite de ne pas entendre ce murmure constant qui appelle à cette liberté individuelle en fin de vie ; libre à nous, libre à vous, de ne pas voter pour ceux qui nous refusent ce droit ultime ; libre à nous, libre à vous de ne pas croire à des promesses alambiquées, énoncées dans le flou absolu. Rappelons-nous pour paraphraser la maire de Lille que lorsque c’est flou, c’est qu’il y a un loup…
De notre côté, ce que nous voulons est très clair : le droit de choisir nous-mêmes le moment et la manière de terminer notre vie, dès lors que la vie n’est plus que de la survie. Appelons cela l’euthanasie, l’interruption volontaire de vie, l’aide active à mourir, ou je ne sais quoi qui nous paraîtrait plus confortable intellectuellement. Mais ne nous laissons pas, ne nous laissons plus berner par la promesse de réunir une commission Théodule composée de beaucoup de médecins et bien sûr de militants anti-choix qui, une fois encore, décidera pour nous ce qui serait bien, nous privant ainsi de notre autodétermination, de notre liberté de disposer de notre corps.
- Au printemps 2017, nous aurons notre traditionnelle semaine de mobilisation. Ce sont tous les marchés de France que nous devrons investir pour informer les Françaises et les Français de leurs droits en matière de fin de vie et pour leur dire que près de chez nous, en Belgique, aux Pays-Bas, au Luxembourg, en Suisse, des pays qui sont de belles démocraties respectées, un droit à la mort digne existe et que celui-ci, n’en déplaise entre autre à monsieur Leonetti, n’emporte ni dérives, ni excès, ni violences, ni perversions. Bien au contraire !
- Durant tout le premier semestre 2017, et comme nos militants l’ont voulu, eux qui ont, dans nos délégations, travaillé six mois sur notre stratégie, un site d’interpellation des candidats sera mis en œuvre. Il présentera – et ce sera un travail gigantesque à accomplir par nos délégués et par nos salariés – les positions de chaque candidat aux élections législatives – il y en aura près de 6.000 – en matière de fin de vie. Ce site permettra également d’envoyer simplement un courriel à celui ou ceux des candidats de notre choix pour lui rappeler que l’ADMD, c’est 36 ans d’existence, plus de 68.000 adhérents motivés et vigilants quant à l’obtention de ce nouveau droit. Pour leur rappeler également qu’il n’y a pas de fatalité à mal mourir dans le pays des droits de l’homme et que les drames de la fin de vie qui arriveront seront le témoignage de leur surdité, de leur manque de compassion, de leur manque de courage… et qu’ils en seront directement responsables.
Je cesse là cette revue des plaisirs à venir pour les mois prochains. Je ne souhaite pas vous effrayer, alors que nous avons encore la tête dans l’été, les pieds dans le sable des plages de cette belle ville des bords de la Méditerranée.
Mais avant de conclure, je vais vous livrer, en parfaite sincérité, le fond de ma pensée… Certes, je suis le président de cette association. Certes nous avons un conseil d’administration engagé et des délégués, des délégués adjoints et des militants très mobilisés et très compétents. Certes, nous assumons nos responsabilités pour faire vivre cette association, dans le respect de nos règles et des lois, et pour obtenir enfin la satisfaction de notre revendication. Mais nous ne sommes, comme chacun d’entre vous, que des bénévoles. Avec nos fatigues, parfois nos maladies, nos failles, nos défaillances, quelques fois nos coups de gueule et souvent nos coups de cœur. Nous n’avons pas vocation à nous faire houspiller en permanence par une infime minorité qui a bien sûr le droit de ne pas être d’accord, mais qui, le vote passé, doit respecter les 93% de votants qui valident la stratégie de notre conseil d’administration. Les 68.000 adhérents de l’ADMD peuvent faire également vivre cette association. Comme administrateur, lorsque des postes sont à pourvoir ; comme délégué lorsque des délégations deviennent orphelines ; comme délégué adjoint pour seconder les délégués dans leur travail ; comme écoutants pour aider et soulager les personnes en difficultés. Car non, l’ADMD n’est pas une simple association de services. C’est une association d’abord et surtout de militants. Et chaque bonne volonté est la bienvenue. Pour construire et avancer !
Donc, plus que jamais, l’année qui vient devra être une année au service de cette revendication portée par notre association et plébiscitée par une écrasante majorité de nos concitoyens. Et lorsque nous aurons enfin, comme les Belges, les Néerlandais, les Luxembourgeois, les Suisses et tant d’autres, ce droit à l’ultime liberté, ce sera une réussite collective et chacun, légitimement, pourra dire :
« J’y étais ; j’ai lutté ; j’ai vaincu »…
Merci à toutes et à tous d’avoir été là aujourd’hui, de toute la France. Merci à nos amis des Alpes-Maritimes, de Monaco, du Var, des Alpes-de-Haute-Provence et des Hautes-Alpes d’avoir parcouru parfois un long chemin pour être parmi nous. Merci à nos amis Italiens ne nous faire l’amitié de soutenir nos actions, eux qui ont tant à faire. Merci à toutes celles et à tous ceux qui s’engagent en faveur du droit de mourir dans la dignité.
Bon retour chez vous et hauts-les-cœurs !
Je sais pouvoir compter sur votre mobilisation partout dans les 10 mois qui viennent.
Et soyez-en sûrs, nous gagnerons parce que cela est juste et parce que cela est dans le sens de l’histoire…
Je vous remercie.