Les réponses des candidats aux présidentielles sur le sida
A Elus Locaux Contre le Sida, nous avons profité du Sidaction pour interroger les candidats aux élections présidentielles sur leurs propositions concernant la lutte contre le sida. Les principaux candidats nous ont répondu.
Je vous reproduis ci-dessous l’intégralité des réponses reçues par ELCS sans jugement de valeur. A celles et ceux qui connaissent la lutte contre le sida de juger de la pertinence des réponses de nos candidats. Le sida n’est ni de droite ni de gauche. Il peut frapper aveuglément chacune et chacun d’entre nous. J’espère que le prochain président ou la prochaine présidente saura porter ce combat difficile comme Jacques Chirac a incontestablement su le faire durant ses deux mandats.
Les réponses des candidats aux présidentielles sur le sida [suite]
Réponses des candidates et candidats à l’élection présidentielle de 2007 au questionnaire d’Elus Locaux Contre le Sida
1/ Etes-vous prêt(e) à relancer l’information, la promotion et l’accessibilité des préservatifs masculins mais également féminins ?
François Bayrou
En 1984, le virus vient à peine d’être découvert par le professeur Montagnier et la France compte 221 cas de sida. Depuis, ce chiffre a malheureusement été multiplié par plusieurs milliers et l’on dénombre aujourd’hui plus de 50 000 cas. Cette donnée alarmante permet à elle seule de juger de l’extension de cette maladie dans un pays qui croit à tort s’être prémuni grâce aux nouvelles thérapies. Et les jeunes d’aujourd’hui qui pensaient appartenir à la génération de l’après sida, sont évidemment les plus menacés. Je suis donc fermement résolu à relancer l’information et à faire en sorte que les préservatifs soient accessibles. Le sida reste une maladie mortelle que seule la prévention permettra d’éradiquer.
Olivier Besancenot
Evidemment. L’information sur la prévention est aujourd’hui quasi absente des medias. C’est pourtant par ce biais que l’on peut informer le plus grand nombre sur l’importance du préservatif. Je suis favorable à ce que des spots de prévention (homo, hétéro) sur les grandes chaînes à différentes heures pendant des semaines. Il faut aussi œuvrer à ce que le coût des préservatifs diminue. De ce point de vue, l’opération initiée par AIDES (5 préservatifs masculins pour 1 euro) est très importante. Il faut favoriser tout ce qui permettra de rendre accessible les préservatifs masculins et féminins. Dans le cas de ces derniers – de ces derniers puisque différents modèles existent – l’enjeu est très important, puisque un préservatif féminin gratuit et accessible un peu partout permettrait à de nombreuses femmes d’accéder plus facilement à des rapports protégés.
Marie-George Buffet
Oui. L’activité des villes et départements dont les communistes ont la responsabilité en témoigne. Il s’agit d’une véritable urgence dans la promotion de la prévention du sida. J’insiste comme vous sur les préservatifs féminins, avec la gratuité de tous les moyens contraceptifs. Il faut aussi se donner les moyens de développer l’éducation, d’en améliorer son appropriation par les utilisateurs et utilisatrices.
Ségolène Royal
Absolument. Il s’agit même d’une urgence. Je voudrais d’ailleurs regretter l’absence de campagnes de prévention, ces dernières années, alors que les contaminations et les pratiques à risque augmentent nettement, remettant en cause tout le travail de prévention – efficace – effectué antérieurement. Le grand plan de prévention, auquel je me suis engagée dans le Pacte présidentiel que je propose aux Français, comprendra la mise à disposition, partout en France, des préservatifs à 0,20€ mais aussi le lancement de campagnes de grande ampleur et ciblées (jeunes, couples, homosexuels, migrants, transsexuels).
Nicolas Sarkozy
Bien sûr. La lutte contre le sida ne doit souffrir d’aucun relâchement. Or chez les jeunes, en particulier chez les homosexuels, l’image du sida s’est banalisée et la vigilance est désormais moins forte qu’il y a vingt ans. Pour lutter contre cette tendance, il faut accentuer les campagnes d’information, de promotion et d’accessibilité concernant les préservatifs tant masculins que féminins. Le préservatif à 20 centimes d’euros est un outil précieux. Je veux que sa diffusion soit beaucoup plus vaste, notamment auprès des buralistes et des pharmaciens qui sont présents sur tout le territoire.
Dominique Voynet
Il est indispensable de relancer la diffusion et la mise à disposition gratuite ou à prix modique des préservatifs féminin et masculin et de développer l'éducation pour la santé.
Nous voulons l’installation de distributeurs de préservatifs masculin et féminin dans tous les lycées (une évaluation réalisée en 2001 estimait à 50% le nombre de lycées équipés ; mais les distributeurs ne fonctionnaient pas tous ou n’étaient pas tous pourvus de préservatifs, masculins à l’époque). Nous demandons également que des crédits spécifiques soient alloués aux établissements pour lutter contre le VIH, et que cette question ne soit pas laissée à la discrétion des politiques d’établissement.
2/ Vous engagez–vous à mettre en place, de façon concrète et rapide, une véritable politique nationale d’éducation à la sexualité dans les écoles avec un volet important sur l’orientation sexuelle?
François Bayrou
La politique d’éducation à la sexualité est partie intégrante de l’éducation à la santé. Face à ce fléau du sida, c’est un devoir pour l’Etat d’informer et de prémunir les jeunes des risques qu’ils encourent. Le fait que le sida ne fait plus la « une » de l’actualité, constitue un facteur de risque considérable. L’école est donc dans ses missions lorsqu’elle rappelle ce que la presse ne dit plus. Je crois également important que ce programme d’éducation à la sexualité évoque la lutte contre les discriminations sexuelles qui sont aussi insupportables à mes yeux que toutes les autres formes de racisme.
Olivier Besancenot
Mes chances d’être élu sont quelque peu réduites, mais si je l’étais, j’aurais à cœur de faire avancer la question de l’éducation à la sexualité. La sexualité n’est ni un tabou, ni un problème. L’éducation à la sexualité doit œuvrer à abolir la domination masculine en matière de sexualité, elle doit rappeler qu’il y a des précautions à prendre comme on dit, qu’il n’y a pas de normes : les programmes doivent aborder les différentes orientations sexuelles.
Marie-George Buffet
Oui à l’éducation à la sexualité dans les écoles sans a priori. La carence pour traiter de l’orientation sexuelle dans le cadre d’une politique d’éducation sexuelle est patente. Il faut la corriger, ce qui implique un débat avec le monde de l'Éducation nationale. Toutes les sexualités excluant les pratiques avec les enfants sont légales. Il faut donc en parler pour éviter l'intolérance – éducation ne voulant pas dire prosélytisme, mais qui y songe ?
Ségolène Royal
Oui. Des modules d'éducation à la vie affective et sexuelle seront mis en place de façon effective au collège et au lycée. Chez nos voisins qui connaissent de tels dispositifs d’éducation à la vie affective et sexuelle depuis longtemps, ces derniers ont fait leurs preuves : on y enregistre les plus faibles taux européens d’IVG et de contaminations par le VIH. Cela montre tout l’impact sur la santé d’une information diffusée sans tabou ni provocation.
Nicolas Sarkozy
L’école doit être un lieu d’ouverture où les élèves doivent apprendre à respecter toutes les formes de différence, y compris les différences d’orientation sexuelle. Elle doit aussi délivrer un certain nombre d’enseignements de prévention afin de permettre aux jeunes garçons et filles d’adopter un comportement responsable à l’âge où, bien souvent, ils découvrent l’amour et donc ses risques. Je crois que nous devons fixer un objectif clair aux établissements scolaires et qu’il leur appartiendra, dans le cadre de l’autonomie que je souhaite leur accorder, de le mettre en œuvre en fonction du contexte et du niveau d’information de leur population scolaire.
Dominique Voynet
Il est très important de développer l'éducation pour la santé à l'école, concernant en particulier la sexualité. Mais la priorité est de mettre en place des dispositifs souples à la disposition des jeunes, pour répondre aux questions qu'ils se posent personnellement, au moment où ils se les posent. Il n'est pas souhaitable d'imposer sur la sexualité un programme où les adultes décident à la place des jeunes ce qu'ils doivent savoir dans telle ou telle classe, sans tenir compte de leur développement et de leurs préoccupations personnelles.
3/ Etes-vous favorable à la poursuite et à l’amplification de la politique de réduction des risques, notamment via la délivrance sous contrôle médical d’héroïne et la mise en place à titre expérimental de salles d’injection ?
François Bayrou
Je préfère les traitements de lutte contre la toxicomanie à la prescription médicale d’héroïne. Je sais évidemment le risque de transmission du VIH par seringues usagées, mais j’observe aussi que l’OMS dans son rapport de 1999 n’a pas retenu cette solution, eu égard au manque flagrant de résultats. Si la lutte contre le sida doit être poursuivie avec la plus extrême constance, le combat contre la drogue doit être placé sur le même plan.
Olivier Besancenot
C’est nécessaire. Cela concourt à une politique globale de réduction des risques. A nouveau, je vais citer AIDES, dont j’ai reçu le président récemment, et faire mienne l’une de ses revendications : les programmes d’échanges de seringues en prison.
Marie-George Buffet
Associations, professionnels et acteurs de terrain ont développé depuis des années des pratiques innovantes de soutien aux personnes dépendantes et des initiatives en faveur de la réduction des risques. Il est temps de leur donner les moyens de développer des expérimentations nouvelles et d’encourager les dispositifs d’accompagnement faisant place à la parole. Il faut aussi renforcer l’aide sociale. Enfin, ils doivent être associés et soutenus comme partenaires incontournables d’une nouvelle politique publique.
Au delà de la santé et de la prévention, de la prise en charge des soins (notamment bucco-dentaire), il faut développer des CAARUD, CSST et une meilleure couverture méthadone.
Il faudrait tripler le nombre de boutiques (trente seulement actuellement). Les ESSIMUD doivent être développés dans toute la France. Les équipes de rue doivent l’être également.
Le problème est aussi qualitatif, avec une offre de soins plus diversifiée, un réel accompagnement social, psychologique et la mise à disposition de logements.
Il faut doubler le nombre de structures de cure et postcure ; augmenter sensiblement les moyens de la MILDT ; créer des lieux d’accès gratuits aux matériels stériles ; engager des politiques publiques novatrices, respectant les personnes.
Il faut aussi tirer les leçons de l’échec des politiques uniquement répressives. La France est à la fois le pays le plus répressif d’Europe et l’un de ceux où le cannabis est le plus banalisé. L’orientation répressive qui prédomine depuis trente ans aboutit à ce que 80 % des moyens sont consacrés à la répression.
La loi réprime dans les mêmes termes l’usage simple, la revente, le trafic, l’importation, l’exportation… Outre qu’elle n’a nullement atteint ses objectifs d’éradication, ni même contenu la diffusion des drogues, cette confusion est extrêmement préjudiciable : elle diabolise les usagers au lieu de leur permettre d’éviter de s’enfoncer ou de poursuivre des pratiques toxicomaniaques. Pourtant, les usagers de drogues se sont révélés très réceptifs aux campagnes de prévention contre le sida qui leur ont été, certes tardivement, destinées.
Je suis donc favorable à ce que, indissociablement, ne soit plus réprimé l’usage privé de drogues et qu’une grande loi de santé publique soit mise en œuvre qui fasse de l’information et de la prévention une priorité nationale. Dans le même temps, je me prononce pour une loi répressive contre le trafic et le blanchiment, donnant à la justice et à la police les moyens d’une action efficace. Il faut lever le secret bancaire dans le cadre des enquêtes sur les trafics de drogues, recruter et former des équipes de spécialistes capables de démanteler les filières.
La prévention devrait être une priorité nationale. Il est urgent que l’Éducation nationale y prenne toute sa part, en y consacrant les moyens. Dans les quartiers défavorisés, les milieux festifs, tout doit être fait pour encourager les initiatives au plus proche des personnes. Prévention primaire en direction des jeunes, prévention secondaire en direction des usagers occasionnels ou réguliers, accompagnement des personnes dépendantes sont les axes d’une politique active de prévention des conduites à risque.
Le dispositif de soins pour les personnes dépendantes reste en France largement sous doté. Les pouvoirs publics doivent agir tant dans le domaine de l’accès aux soins et aux droits que pour offrir à tous les usagers de psychotropes les moyens de prises en charge adaptées. Il faut conserver la gratuité des soins et la possibilité de l’anonymat. La prévention et l’accès aux soins les plus précoces sont non seulement efficaces socialement mais aussi efficaces au plan économique.
Par cette politique, je souhaite contribuer à l'émergence d'une autre relation de la société aux drogues et aux toxicomanies, tant les politiques publiques et les réponses institutionnelles se sont révélées, au cours des dernières décennies, tantôt inefficaces, tantôt gravement néfastes.
Ségolène Royal
Concernant la lutte contre les drogues, mon ambition est de mettre en place une véritable politique de santé publique basée sur l’information, la prévention et les soins. La politique de réduction des risques, menée par la Mission Interministérielle de Lutte contre la Drogue et les Toxicomanies (MILDT), sera évidemment poursuivie et améliorée pour plus d’efficacité, avec en particulier une action forte de sensibilisation aux dangers de la consommation de drogues le plus tôt possible. On sait, en effet, que plus l ’âge de la première consommation est précoce, plus le risque est grand d’une consommation ensuite problématique. Les acteurs associatifs de prévention qui sont au cœur de la réduction des risques devront être soutenus et un dispositif d’évaluation de cette politique, indépendant et permanent, sera créé, dont les résultats seront rendus publics.
Nicolas Sarkozy
Il est incohérent de vouloir réduire certains risques en autorisant d’autres risques. La drogue ne détruit pas seulement les liens familiaux et sociaux : elle détruit aussi la vie. Mon objectif est non seulement de permettre aux toxicomanes de sortir de leur dépendance, mais aussi, surtout, de ne jamais y entrer. La délivrance de drogue sous contrôle médical est donc évidemment contraire à cet objectif.
Dominique Voynet
La politique de réduction des risques est à poursuivre, mais à condition de ne pas en faire la panacée. Elle ne doit pas se substituer à une politique d'accueil et d'orientation vers la désintoxication ou la psychothérapie. Si l'on oubliait ces éléments, la politique de réduction des risques pourrait devenir une solution de facilité qui représente une démission vis-à-vis de la mission d'aide et de soin.
4/ Vous engagez-vous à prendre toutes les mesures nécessaires au respect des dispositions de la loi du 10 juillet 1987 par les trois fonctions publiques (tout particulièrement les administrations centrales, cabinets ministériels et collectivités territoriales de plus de 20 salariés), tenues à l’obligation d’embauche de 6% de personnes handicapées dans leurs effectifs ?
François Bayrou
Evidemment. Aujourd’hui, l’Etat donne le plus mauvais exemple, avec 3,17 % de personnes handicapées et 1,43 % pour les services du Premier ministre. La loi du 10 juillet 1987 pose une obligation d’emploi, et une obligation, ce n’est pas une simple faculté laissée au bon vouloir des employeurs, surtout lorsqu’ils appartiennent à la sphère publique. Si ces derniers ne respectent pas la loi, comment exiger du privé qu’il s’y plie ? Cette obligation, c’est le symbole de la lutte contre les discriminations liées au handicap : c’est un devoir moral.
Olivier Besancenot
Je pense que chacun doit pouvoir accéder à un emploi stable et correctement rémunéré, que l’on ait un handicap ou pas. C’est possible dans le cadre d’une modification radicale de la répartition des richesses. Cela passe notamment par une diminution du temps de travail avec embauche correspondante. En attendant, il est nécessaire de lutter contre toutes les discriminations. La loi de 1987 s’inscrit dans cette perspective. Il est donc nécessaire qu’elle soit réellement appliquée.
Marie-George Buffet
Oui ! Il est indispensable de proposer un plan, dans le temps, de mise en place complète de ces dispositions.
Ségolène Royal
Absolument car je considère que l’emploi constitue un vecteur privilégié de l’intégration sociale. Je vous rappelle qu’en ma qualité de ministre déléguée à la Famille , à l’Enfance et aux Personnes Handicapées, j’ai amplifié l’insertion professionnelle des personnes handicapées dans la fonction publique d’Etat et entrepris une généralisation des dispositifs de maintien dans l’emploi. Il faudra reprendre et étendre ces actions.
Nicolas Sarkozy
Oui. Je trouve choquant que les entreprises préfèrent signer un chèque plutôt que de respecter cette obligation d’embauche. Je trouve encore plus choquant que les pouvoirs publics eux-mêmes ne se donnent pas la peine de donner l’exemple. Une action volontariste est possible : je l’ai prouvé dans les Hauts de Seine où j’ai quadruplé le nombre de collaborateurs handicapés en moins de trois ans.
Dominique Voynet
La question de l'accès à l'emploi fait partie intégrante de la citoyenneté au même titre que l'accès aux droits, à la santé, à la culture, aux déplacements... Aujourd'hui même si la législation a été récemment renforcée, il reste très difficile pour une personne porteuse d'une maladie chronique d'accéder à un emploi. Bien souvent, les recruteurs, du secteur privé ou du secteur public, ont des réticences à donner leurs chances à ces personnes, réticences fondées sur la peur de l'autre et bien souvent sur l'ignorance de la réalité de la maladie. C'est bien à cette ignorance qu'il faut s'attaquer, afin de tordre le cou aux idées reçues, selon lesquelles une personne malade et même handicapée n'est pas capable, sera absente de son travail plus qu'une personne valide, aura des problèmes d'adaptation dans une équipe...
Je m'engage bien évidemment à ce que l'Etat applique dans ses propres services les dispositions qui ont été votées par le Parlement. Il ne peut pas exiger des français de respecter la loi, si lui-même ne la respecte pas. Il faut aussi que les syndicats s'investissent dans cette lutte.
Enfin, étendre la loi de 1987 sur l'obligation d'emploi des personnes handicapées aux personnes souffrant d'affection reconnue ALD favoriserait leur accès à un emploi. Cette réforme devrait s’accompagner d’une augmentation du taux d’emploi obligatoire, puisqu’elle consisterait en un élargissement de l’éventail de la population concernée.
5/ De même êtes-vous prêt(e) à favoriser le retour à l’emploi des personnes séropositives via la réversibilité de l’AAH pour ceux qui désirent reprendre un emploi, le financement de stages de retour à l’emploi et la mise en place de dispositions innovantes autre que le mi-temps thérapeutique ?
François Bayrou
Le sida génère des situations de précarité et d’exclusion particulièrement douloureuses. Il ne reste bien souvent que l’Allocation Adulte Handicapé pour tenter de survivre. Mais lorsque l’espoir renaît, que la maladie laisse des instants de répit, le retour à l’emploi doit être soutenu. Je propose une réforme en profondeur des minima sociaux pour simplifier et inciter fortement au retour à l’activité. Je l’appelle l’Allocation unique par points conciliable un certain temps avec un salaire, de manière dégressive. C’est une mesure de bon sens qui doit connaître son prolongement naturel dans le domaine de la formation. Beaucoup de malades qui connaissent une situation d’exclusion qui se compte en années, ont besoin d’être accompagnés.
Olivier Besancenot
A nouveau, je pense qu’il est possible que chacun puisse bénéficier d’un emploi. C’est vers cela qu’il faut aller. Il convient dès lors de prendre en compte les moments de fatigue, les difficultés que peut connaître une personne handicapée dans l’exercice de son emploi. Aucun salaire ne doit inférieur au SMIC et celui-ci doit être porté à 1500 euros net. Dans cette optique, je suis favorable à toutes les dispositions innovantes.
Marie-George Buffet
Oui, car la réversibilité de l'AHH a le mérite d'éviter d’enfermer quiconque dans le handicap, ceci sans mettre personne en situation plus défavorable.
Ségolène Royal
Oui et l’un des engagements du pacte présidentiel est précisément d’adapter les conditions d’attribution de l’AAH aux maladies évolutives à diagnostic incertain. L’écoute des propositions des associations s’intègrera naturellement dans ma démarche de démocratie participative et je suis ouverte aux projets innovants et dispositifs originaux et efficaces qu’elles proposeront dans ce domaine.
Nicolas Sarkozy
Le travail est pour moi une condition de la liberté et de la dignité. Je veux rendre possible l’accès au travail pour tous. Par suite, logiquement, je veux sortir de la logique des minima sociaux qui enferment chacun dans son handicap, dans sa maladie, dans son mal-être. C’est pourquoi je souhaite reprendre la proposition de Martin Hirsch d’instaurer un revenu de solidarité active qui permettra d’encourager réellement tous ceux qui le souhaitent à vivre de leur travail en garantissant qu’on gagne vraiment plus d’argent en travaillant qu’en ne travaillant pas.
Dominique Voynet
Evidemment oui. Cette mesure est une mesure de bon sens. Notre système est trop cloisonné et aboutit parfois à enfermer dans un statut limitant l'autonomie des gens qu'il prétend aider. Des passerelles entre les statuts sont indispensables et ne porteraient préjudice à personne !
6/ Etes-vous disposé(e) à mettre en place une véritable politique de lutte contre le sida spécifique aux prisons, dans les domaines de la prévention, des soins et de la réinsertion ?
François Bayrou
Les prisons françaises sont une honte pour la République. Tout est à refaire, rénovation des bâtiments, accès à la santé, formation professionnelle pour éviter les « sorties sèches ». Je propose de doubler le budget de la justice sur dix ans afin de mettre en œuvre une nouvelle loi de programmation de la justice et une grande loi pénitentiaire. Nous sommes aujourd’hui dans une situation de non droit humiliante pour la « patrie des droits de l'homme. La privation de liberté doit être la seule sanction infligée aux détenus et les droits fondamentaux doivent être garantis en prison : droit à la dignité humaine, droit à la santé - les personnes dont l’état de santé, physique et psychique, rend le maintien en détention indigne, doivent être libérées pour faire l’objet d’un placement au sein de structures d’accueil et de soins -, droit à la formation, droit au respect de la vie familiale.
Olivier Besancenot
J’ai déjà un peu répondu à cette question. Concernant les programmes d’échange de seringues, ceux-ci existent à l’extérieur et ont fait leurs preuves, il est normal de les imposer dans les prisons françaises. C’est la même chose pour les traitements de substitution. Ceux-ci sont utiles et nécessaires. Les détenu(e)s doivent avoir accès à l’ensemble de ce qui existe, quelque soit l’avis du directeur de la prison dans laquelle ils/elles ont été enfermé(e)s.
Marie-George Buffet
Oui. L'ampleur de l'épidémie du VIH et du VHC parmi les usagers de drogues par voie intraveineuse avait révélé leur situation sanitaire et sociale dramatique et la nécessité de nouvelles approches (réduction des risques...). Les rapports parlementaires sur les prisons (Sénat et Assemblée nationale) confirment les méfaits de l'incarcération des usagers. Des mesures spécifiques aux prisons en faveur de la prévention, des soins et de la réinsertion sont effectivement nécessaires
Ségolène Royal
Concernant la situation des prisons, sur un plan général, j’ai déjà fait part, à plusieurs reprises, de ma ferme détermination de mettre fin au caractère indigne de l’état des prisons françaises. Par ailleurs, je suis consciente du fait qu’il y a urgence à mener, dans les prisons, une véritable politique de santé publique : une grande enquête épidémiologique sera réalisée, les moyens des UCSA seront augmentés pour améliorer le suivi médical et sanitaire des détenus et des préservatifs seront distribués gratuitement. Je suis, en outre, disposée à étudier toutes les solutions qui ont montré leur efficacité à l’étranger et sont susceptibles d’œuvrer pour une véritable réduction des risques.
Nicolas Sarkozy
Etre incarcéré, c’est être privé de sa liberté d’aller et venir, pas être exposé au VIH ou à toute autre maladie. La lutte contre le sida ne doit donc pas s’arrêter à la porte des prisons. Une politique de prévention et de protection doit y être menée. Les détenus atteints par le virus du sida doivent avoir accès aux traitements adéquats dans les mêmes conditions que tous nos concitoyens.
Dominique Voynet
De façon générale, les conditions de détention actuelles dans notre pays sont un scandale. Pour ce qui concerne la lutte contre l’épidémie de sida, il faut d’abord cesser de se voiler la face : le taux de prévalence du VIH en prison est sans commune mesure avec le reste de la société, de 4 à 10 fois supérieur d’après une enquête du journal Têtu. C’est à partir de ce constat qu’il faut réagir, et reconnaître qu’il y a une vie en prison, que cette vie inclut, qu'on le veuille on non, la consommation de drogues et la sexualité. Il faut donc : permettre l’accès au préservatif en prison ; mettre en place une politique de réduction des risques par l'information, l'accès aux traitements de substitution, aux seringues propres, en cessant de se mentir en faisant comme si la drogue n’entrait pas dans les prisons, ce qui aboutit à laisser se développer l’épidémie ; homogénéiser l’accès aux traitements de substitution.
Mais plus profondément, nous sommes favorables à une plus large application de la loi Kouchner , et même à la reconnaissance de l’incompatiblité entre la détention et la maladie, lorsque l'état du malade nécessite des traitements lourds.
7/ La Guyane a 4 fois plus de cas de sida que la métropole, la Guadeloupe 3 fois plus et la Martinique 2 fois plus. Seriez-vous prêt(e) à mettre en place un véritable plan Marshall dans la lutte contre le sida dans les départements français d’Amérique?
François Bayrou
La politique de santé publique ne se divise pas, elle ne dépend pas de la distance par rapport à Paris. Vous dites juste, l’outre-mer souffre terriblement du sida. Il s’agit donc pour les pouvoirs publics de tout mettre en œuvre pour éradiquer cette maladie. Nous en avons les moyens, ce serait irresponsabilité totale de ne pas les mettre en œuvre.
Olivier Besancenot
Il est nécessaire d’augmenter sérieusement les budgets liés à la prévention, de faciliter encore plus le dépistage et d’assurer un véritable accès aux traitements. Mais la lutte contre l’épidémie de sida passe aussi par une lutte contre les inégalités. Si ces départements sont autant touchés, c’est aussi parce qu’y résident beaucoup d’individus précarisés.
Marie-George Buffet
Il est indéniable qu'il faut traiter autrement les territoires gravement touchés en accentuant l'effort et en développant des programmes prenant les aspects culturels mieux en compte.
Mais il faut aller plus loin et poser le problème à l’échelon mondial, la France se devant d’avoir une démarche exemplaire en la matière en lien avec l’OMS et en faisant échec aux multinationales du médicament. C’est une des raisons pour lesquelles je propose un Pôle public du médicament.
Ségolène Royal
Compte tenu de la situation de l’épidémie dans les départements français d’Amérique, ma première action sera d’y lancer de très grandes campagnes d’information et de prévention adaptées. Il faudra également redoubler d’efforts pour y améliorer les systèmes de santé et augmenter les investissements humain et financier dans ce domaine.
Nicolas Sarkozy
La prévalence de cette maladie dans les départements français d’Amérique justifie, à l’évidence, des moyens particulièrement renforcés. Il faut aussi sans doute adapter notre politique de prévention à la spécificité de ces départements, dans lesquels la maladie se heurte à de nombreux tabous et qui connaissent des flux permanents de touristes, de saisonniers et d’immigrants. L’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé a mené de nombreuses actions dans ce sens. Je veillerai à les renforcer.
Dominique Voynet
Ces 3 départements font partie de la France ! Il est donc indispensable que les politiques nationales y soient mises en oeuvre. La politique de santé publique prévoit aujourd'hui un Plan Régional de Santé Publique (PRSP) concerté avec les acteurs régionaux réunis dans les Conférences Régionales de Santé (CRS) et dont le but est précisément d'adapter les politiques nationales aux priorités locales. Il faut donc faire fonctionner réellement ces dispositifs et il est clair que dans ces départements tout particulièrement, le SIDA fait partie des priorités, en termes de soins, mais bien sûr aussi en termes de prévention.
8/ Vous engagez-vous à préserver en l’état l’article 12bis11 de l’ordonnance de 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France, article qui donne droit au séjour pour raison médicale, et à garantir l’application pleine et entière de cette disposition?
François Bayrou
Cette réglementation doit être pleinement appliquée. D’un point de vue de santé publique d’abord, car un moindre accès aux soins va à l’encontre des efforts de contrôle de l’épidémie. Du côté des principes enfin, car on ne peut refuser d’accorder un titre de séjour à un étranger résidant habituellement en France, et dont l’état de santé nécessite une prise en charge médicale urgente dont il ne peut bénéficier dans le pays dont il est originaire. C’est la loi et elle est juste.
Olivier Besancenot
Je suis favorable à la libre circulation de toutes les personnes. Alors, évidemment, les migrants malades doivent être accueillis. Ils doivent pouvoir bénéficier des mêmes droits que les citoyennes français en matière de couverture médicale par ailleurs.
Marie-George Buffet
Il est grand temps de renouer avec ce qui fait la réputation et la grandeur de notre pays. Dans ce domaine, je propose l ’annulation de la réforme Douste-Blazy qui instaure une médecine à deux vitesses et ouvre sur une privatisation de la Sécu. Je préconise d’aller vers un remboursement à 100% pour tous. Cela implique une démocratisation de l’assurance maladie, en confiant sa gestion aux assurés sociaux, en lui donnant des moyens financiers par l’augmentation de la cotisation patronale, en la faisant bénéficier d’une cotisation additionnelle sur les revenus financiers des entreprises et en instaurant une modulation des cotisations en fonction des politiques d’emploi et salariale des entreprises.
Ségolène Royal
Le droit des étrangers malades à accéder à un traitement est cohérent avec une politique de santé publique juste et efficace. Il s’agit cependant d’un droit humanitaire qui ne peut tenir lieu de critère automatique de délivrance d’un titre de séjour. Par ailleurs, je m’engage, pour des raisons de dignité et de santé publique, à rétablir les moyens supprimés par la droite et à revenir à la simplification et à l’immédiateté de l’accès à l’AME pour les soins aux étrangers en situation irrégulière.
Nicolas Sarkozy
Je crois que mon bilan parle de lui-même. En 2001, le gouvernement de Lionel Jospin a accordé 2 100 cartes de séjour à des étrangers malades. En 2006, nous en avons attribué plus de 6 000. En luttant contre le détournement de la loi par tous ceux qui n’avaient pas de raison de venir se faire soigner en France, nous avons facilité l’accueil de ceux qui en avaient le plus besoin, en particulier les malades du sida. Je continuerai naturellement sur cette voie si je suis élu.
Dominique Voynet
Un rapport de l’Observatoire du droit à la santé des étrangers a montré, en 2003, que le « droit au séjour pour raisons médicales » était devenu un droit virtuel. Les diverses mesures tendant à restreindre l’accès à l’AME vont dans le même sens : sur fond de présomption de fraude, on tente de dissuader les étrangers en situation irrégulière d’accéder au système de soins. C’est inacceptable tant sur le plan éthique que sur le plan de la santé publique. La précarisation des droits des migrants est en aggravation constante. Les Verts demandent que la France ratifie la Convention Internationale des Droits des Migrants, qui vise à garantir le respect des libertés fondamentales et des droits de la personne humaine.
Il faut aussi que la CMU devienne véritablement universelle et concerne toutes les personnes résidant en France, dont l’état nécessite des soins, est la seule solution juste et nous la soutenons sans réserve. Des ajustements seraient bien sûr nécessaires, la CMU et l’AME n’ayant pas aujourd’hui les mêmes sources de financement.
Mais il faut aller au-delà et reconnaître un véritable droit au séjour fondé sur des considérations médicales. A cet égard, la lecture restrictive que font certaines préfectures des critères médicaux a des conséquences terribles : la présence de traitements antirétroviraux dans un pays ne suffit malheureusement pas à garantir l’accès aux soins dans le pays d’origine pour l’ensemble des malades (des disparités géographiques existent dans certains pays, la quantité insuffisante des traitements ne permettent pas de traiter tous les malades, etc.).
Ceci nous conduit, évidemment, à demander que des consignes soient adressées aux préfectures pour une harmonisation des pratiques sur l’ensemble du territoire, mais aussi très sensiblement accéléré.
9/ Etes-vous favorable à la création d’une mission interministérielle de lutte contre le sida ?
François Bayrou
C’est une suggestion utile qui permettrait de une meilleure coordination de la lutte contre le sida et d’offrir un cadre au travail en commun des acteurs publics et des associations.
Olivier Besancenot
Tout ce qui favoriser la lutte contre l’épidémie est bon à prendre.
Marie-George Buffet
Pourquoi pas ? La MILDT a fait preuve d’une certaine efficacité, mais ce qui est déterminant, c’est qu’il y ait une réelle volonté politique et que les moyens en soient à la hauteur. Ces questions ne peuvent être laissées aux seuls professionnels : les politiques doivent garder la maîtrise des orientations en santé publique.
Ségolène Royal
Non, car je pense qu’il ne faut pas multiplier les structures. Mais les associations seront étroitement partie prenante de la définition de la politique de lutte contre le sida, dans le cadre de partenariats pluriannuels.
Nicolas Sarkozy
S’agissant de la prévention et du traitement d’une maladie mortelle, je pense qu’il est préférable que le ministre de la Santé reste le principal responsable des actions qui sont menées. Pour les aspects plus transversaux, il existe déjà un comité interministériel de suivi de la lutte contre le VIH. Je ne vois pas de raison de modifier cette organisation.
Dominique Voynet
A mon sens, les politiques françaises de santé sont plutôt malades d'un excès de dispositifs et de réformes qui ajoutent des nouveaux dispositifs.
Par ailleurs, actuellement, il faut bien reconnaître que l'"interministériel " est souvent un facteur de cloisonnement entre les missions, chacun essayant de " marquer son territoire ", plutôt que de coordonner le service rendu. Il me paraît prioritaire pour répondre aux besoins de la population de revaloriser le rôle du Ministère de la Santé qui a la mission de lutte contre le sida. Il s'agit de faire fonctionner ses services de façon plus coordonnée et plus proche des besoins. Un enjeu important est aussi de renforcer le poids du Ministère de la Santé dans les arbitrages interministériels.
Commentaires
Et que Nicolas Sarkozy soit LE SEUL à avoir refusé de répondre aux revendications de AIDES et à avoir refusé de les rencontrer, ça te fait quoi ?